📌 Harkis de Pertuis : la mairie accuse l’association de « militantisme islamiste » et lui ferme l’accès à la stèle

Posted 26 septembre 2025 by: Admin
L’Interdiction Polémique D’Une Commémoration Harkie
Le 25 septembre, journée nationale d’hommage aux Harkis, une scène inédite s’est déroulée à Pertuis dans le Vaucluse. À 14h30, plusieurs membres et soutiens de l’association Français Musulmans Rapatriés de Pertuis se sont vu interdire l’accès à la stèle commémorative pour une simple minute de silence en mémoire des soldats musulmans de l’armée française.
Face à l’impossibilité d’accéder au mémorial communal, les participants – fils et petits-fils de Harkis accompagnés d’un ancien combattant – ont été confrontés aux policiers municipaux et gendarmes déployés spécialement pour faire respecter un arrêté municipal tombé quelques heures plus tôt.
Le contraste frappe par son absurdité : pendant que les forces de l’ordre empêchent cette commémoration spontanée, la cérémonie officielle était programmée le même jour en présence du maire Roger Pellenc et du sous-préfet d’Apt, sur le site de l’ancien camp Harkis du Clos des Jardins.
« C’est la première fois qu’on voit ça », déplore Cherif Lounès, membre de l’association, contestant la méthode utilisée par la mairie pour interdire cette manifestation annoncée quelques jours plus tôt sur les réseaux sociaux. Une interdiction qui révèle des tensions plus profondes au cœur de cette commune vauclusienne.
Les Accusations Controversées De La Mairie
Ces tensions se cristallisent dans les justifications officielles avancées par la municipalité. Le 22 septembre, trois jours avant la commémoration, la mairie de Pertuis publie un communiqué pour expliquer son interdiction. Premier argument : la manifestation n’était « pas déclarée » selon les procédures administratives en vigueur.
Mais c’est l’accusation suivante qui fait scandale. La municipalité affirme que « l’association mêle, dans ses prises de position, un militantisme islamiste à des thématiques mémorielles, ce qui constitue une instrumentalisation de l’Histoire inacceptable ». Une charge lourde de sens contre des descendants de Harkis venus honorer leurs ancêtres.
Plus surprenant encore, le communiqué municipal « déplore » l’utilisation des symboles républicains comme le drapeau français « sans autorisation ». Une formulation qui interroge : depuis quand faut-il une permission pour brandir le tricolore lors d’une commémoration patriotique ?
Face à ces accusations, l’association Français Musulmans Rapatriés de Pertuis réfute fermement et envisage de porter plainte pour « diffamation ». D’autant que l’examen de l’arrêté municipal publié ce jeudi révèle une incohérence troublante : ces deux arguments majeurs – militantisme islamiste et usage non autorisé du drapeau – n’y figurent pas. Une contradiction qui questionne la cohérence de la démarche municipale et suggère d’autres motivations.
Les Véritables Enjeux Derrière L’Interdiction
Ces autres motivations évoquées se révèlent effectivement dans l’arrêté municipal officiel. Derrière la façade mémorielle se cache un conflit bien plus prosaïque : « des désaccords persistants depuis plusieurs mois entre différentes associations locales à propos de l’usage d’un local associatif », précise le texte. Une dispute de voisinage qui empoisonne désormais la commémoration nationale.
L’affaire fait désormais l’objet d’une procédure judiciaire en cours, révélant l’ampleur des tensions locales. Selon l’association Français Musulmans Rapatriés de Pertuis, cette interdiction constitue surtout une réponse à leur refus de signer ce qu’ils qualifient de « convention précaire » en 2023. Un bail qu’ils ont décliné, provoquant visiblement l’ire municipale.
L’arrêté invoque également « le risque de troubles à l’ordre public » pour justifier le déploiement de forces de l’ordre face à une poignée de descendants de Harkis venus se recueillir. Une disproportion qui interroge sur la réalité de cette menace lors d’une simple minute de silence.
Pour une proche de l’association présente sur les lieux, l’affaire relève avant tout du « politique » et traduit une « islamophobie ambiante ». Une grille de lecture qui transforme un conflit immobilier local en symbole d’une fracture mémorielle plus profonde, touchant au cœur de l’héritage harki.
Un Symbole Brisé De La Mémoire Harkie
Cette fracture mémorielle trouve son expression la plus poignante dans la scène qui s’est déroulée après l’interdiction. Très émue par cette situation inédite, une proche de l’association s’est finalement rendue seule devant le mémorial pour s’y recueillir. Un geste solitaire qui contraste cruellement avec la commémoration collective initialement prévue.
L’inscription gravée sur cette stèle résonne aujourd’hui avec une amertume particulière : « en hommage et reconnaissance au courage des Harkis victimes de la Guerre d’Algérie, désarmés et abandonnés à leur sort par l’exécutif ». Des mots qui semblent faire écho à l’interdiction de ce 25 septembre, comme un abandon répété de ces familles par les institutions.
Pour cette témoin, l’affaire traduit une « islamophobie ambiante » qui gangrène désormais jusqu’aux cérémonies mémorielles les plus légitimes. Une accusation grave qui transforme ce conflit local en révélateur des tensions communautaires actuelles.
Contacté par La Provence pour s’expliquer sur cette décision controversée, le maire Roger Pellenc n’a pas répondu aux sollicitations. Un silence qui laisse les familles harkies de Pertuis face à leurs interrogations, privées d’explications sur cette interdiction historique lors de leur journée nationale de commémoration.
L’ironie de cette situation frappe par sa cruauté : interdire l’accès à un mémorial dédié aux oubliés de l’Histoire à leurs propres descendants.